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Travail et règles de l’art

Édito janvier 2024 : travail et règles de l’art

Quand, dans le cadre du collectif KELVOA, nous avons publié en 2017 (plus de 6 ans déjà), avec 18 contributeurs l’ouvrage « L’art d’accompagner autrement », nous souhaitions élargir les points de vue sur l’accompagnement, remettre de la délibération dans des questions qui ne peuvent se contenter de consensus tièdes (par exemple l’accompagnement est indispensable). J’écrivais en introduction : …nous avons appelé ce livre « L’art d’accompagner…autrement ».

Pourquoi parler d’art ? Comme tous les artistes le savent, improviser, inventer en situation supposent un long apprentissage préalable, qui n’est pas la simple imitation de procédures déjà écrites, mais bien un travail régulier, des allers retours incessants entre ce qu’on veut, ce qu’on fait et ce qu’on observe de ce qu’on a fait. Une réflexivité permanente qui ne peut se contenter de fiches techniques mais qui a néanmoins besoin d’un cadre d’intervention. Un partage de règles de l’art en somme. »

La formule « Les règles de l’art » peut ouvrir de nombreux débats. D’actualité ceux-là. Tous les acteurs de la formation, du conseil et de l’accompagnement le savent : la dernière version (V9) de Qualiopi est en ligne. Notre propos n’est pas d’en faire l’analyse ni la critique mais plutôt de voir en quoi cette certification, qui permet d’établir la conformité́ des processus mis en place au référentiel national qualité́, peut s’articuler avec cette question de règles de l’art. Mais surtout comment tous ces éléments normatifs transforment le travail et impactent la possibilité (ou non) d’y mettre du sien. Car après la gouvernance par les nombres (chiffres, ratios, scores, reporting en tous genres…) magnifiquement décrite par Alain Supiot, voilà donc que s’installent, l’air de rien, la gouvernance et la sélection par les normes et les labels.

Cela pose la question de la place de la conformité dans des activités qui par définition ne sont jamais duplicables et pré-déterminables. Et ouvre la porte à des mécanismes incessants de contrôle de conformité (versus) financeur et de justification permanente (versus professionnel). Car s’agit-il de faire ce qui est prévu ou de faire ce qui convient en situation ? L’articulation conformité/pertinence est à nouveau en débat quand se pose la question du travail bien fait et de la possibilité d’y apporter sa contribution. Tous ces éléments qui nous touchent ne sont-ils pas emblématiques des débats plus larges sur le travail.

Car le travail est en question. Les publications et sondages se succèdent. Au-delà de l’effervescence générée par la simple mention « L’avenir du travail », c’est bien la multiplicité des facettes interrogées qui frappe : organisation, management, impacts sur la santé, sens, prise en compte des questions écologiques dans les choix individuels de carrière, place des IA génératives, questions sur la mixité et l’égalité professionnelle. Tout se mélange car évidemment, tout est lié. Cette question n’est évidemment pas nouvelle. Et elle est largement documentée par les sciences sociales en général depuis des décennies. Mais la période apparaît secouée de grandes variations à la fois intenses, multifactorielles et impactant tous les secteurs et toutes les zones géographiques. Cela se manifeste par des symptômes (phénomène dit de la « grande démission », tensions de recrutements, désaffiliation des publics vis-à-vis des dispositifs, perte d’attractivité des territoires…), interprétés de façon différente par chacun des acteurs. Et où les pistes d’action proposées sont parfois paradoxales et souvent polémiques.

De fait, l’avenir du travail peut paraître une question usée, épuisante, car multifactorielle et porteuse d’idéologies clivantes. De plus l’imprévisibilité du moment peut nous laisser sceptiques voire tétanisés. Car au-delà de ces enjeux collectifs, la question de son propre travail, du sens qu’il a et de la possibilité d’y mettre véritablement du sien est une autre facette qui est le quotidien des professionnels de l’accompagnement. Changer de travail, rompre, se renouveler…oui, mais pour quoi d’autre qui soit mobilisateur et sensé.

La sociologue Dominique Meda s’y essaie dans une interview éclairante (Le travail dans un monde post-croissance) et qui montre bien aussi les tensions voire controverses à l’œuvre, notamment parce qu’elle fait le lien avec les enjeux écologiques et les limites planétaires d’une croissance insoutenable. Alors, renoncer à en parler ? Évidemment, non !

Tous ces thèmes (accompagner autrement, l’avenir du travail, l’orientation professionnelle vers un monde soutenable et juste… ) seront au cœur de nos échanges et rencontres en ce début d’année 2024.

L’avenir du travail : entre tensions collectives et interrogations individuelles

Webinaire le vendredi 22 mars 2024 de 14 H 00 à 16 H 30

Avec les interventions d’Agnès HEIDET, Isabelle PAUTRAT et André CHAUVET.

Nous chercherons à donner des points de repère, mettre en discussion quelques questions difficiles, tracer des perspectives concrètes. Nous y aborderons :

  • La relation au travail, à son travail : de nouvelles modalités d’engagement ?
  • Accompagner vers le travail : quelles conceptions de l’individu, de l’employabilité et de la justice sociale en arrière-plan ?
  • Place du travail et au travail : quelles approches renouvelées de l’ingénierie de l’accompagnement et de la formation prenant en compte les enjeux d’égalité professionnelle ?

Plus d’info sur le webinaire

INSCRIPTION EN LIGNE

Oser le pas de côté : la ludopédagogie au service du développement du pouvoir d’agir

Rencontre le 16 avril 2024 en présentiel à Évreux de 9 H 30 à 17 H 00

Rencontre co-organisée avec nos amis du CIBC Normandie.

Une rencontre co-organisée avec nos amis du CIBC Normandie intitulée : Oser le pas de côté : la ludopédagogie au service du développement du pouvoir d’agir qui nous donnera l’occasion de voir l’impact du jeu tant dans les processus de professionnalisation que d’accompagnement des publics. Et nous aurons aussi l’occasion d’expérimenter, de jouer et d’en percevoir les impacts et bénéfices.

La rencontre aura lieu à LA BOITE A, (https://www.laboite-a.fr) tiers -lieu dédié à la ludopédagogie. 

Inscriptions à venir sur le site.

Orienter sa vie professionnelle vers un monde soutenable et juste.

Rencontre Européenne les 6 et 7 juin 2024 à Marseille

Ce séminaire, organisé par un groupe de travail national (en lien avec des collègues européens impliqués dans un projet Erasmus « Exploring Green Guidance ») initié en juillet 2023 et qui se réunit régulièrement autour des questions d’orientation verte et de soutenabilité des choix professionnels présentera les données recueillies et les pistes explorées. KELVOA sera partie prenante de ces rencontres. La place et les impacts des questions écologiques seront au cœur des débats et apports permettant à la fois d’éclairer la thématique de nombreux travaux de recherche mais également de donner à voir des dispositifs ou outils d’accompagnement qui prennent en compte ces dimensions (informations à venir sur le site).

Et de très nombreuses autres manifestations à venir, notamment la présentation de la synthèse du projet Européen ApprEUnance, piloté par l’UNMFREO et auquel KELVOA a contribué. Mais également un webinaire « Accompagner autrement : les chemins de traverse », le mardi 14 mai 2024 à 16 H 30, que nous vous présenterons très bientôt.

 

Au plaisir de vous retrouver.

André Chauvet